Il était très tard, ou très tôt, selon le point de vue. Mais les rayons du soleil commençaient à pointer leur nez. Non vous humains vous ne pouviez même pas les voir, les sentir, les ressentir. Pour vous ce n'est encore que la nuit noire. Mais pour un vampire, même un jeune vampire, c'est une autre histoire. Oskar ressent en tout cas comme une brulure sur sa peau, délicate au départ, il sait que c'est l'heure de rentrée se terrer dans sa crypte aménagée. Il est particulièrement sensible au soleil, il le sait et ne joue jamais avec ça. Non il a gagné l'immortalité ce n'est pas pour se laisser cramer au soleil, le monde a encore tellement à offrir et a donné. Voir de stupides humains s'entre-tués comme si eût vampire et autres créatures ne les massacraient pas assez comme ça. A vrai dire c'est vrai qu'ils sont tels des parasites et ne cesse de se reproduire, pire que des insectes qu'on déteste tant, qu'il déteste temps. Il rentre dans sa crypte seule, pour une fois, une chose rare, il n'a pas apporté de jouet pour passer sa trop longue journée. Non Oskar doit s'avouer fatigué ce soir, un de ces repas n'était pas des meilleurs et cela lui reste sur le ventre. Alors il passera pour une fois sa journée à dormir, ou à faire d'autre chose que de torturer une victime. Allongé dans son grand lit bien vide, des draps sombres. Si sa peau n'avait pas été si blanche, on aurait pu le confondre dans cette immensité noire.
Elle, oui elle, Lorelei, sa créatrice, celle qui lui a donné la vie de nouveau. Ses temps-ci il rêve souvent d'elle, de leur journée ensemble, comme si elle était proche de lui de nouveau. Quelque part il sait qu'elle est là, mais il a tellement essayé de l'effacer de ses pensées que c'est comme un poison dans ses veines. Pourtant chaque fois qu'il revoit son visage en rêve il se sent si bien de nouveau. Il voudrait qu'elle soit de nouveau là à ses côtés, imprégner ses narines de son parfum, touché sa peau douce et froide. Mais elle est partie, elle l'a abandonné.

Les lumières commençaient à s’éteindre pour cette nouvelle journée. Le temps de rentrer après un travail acharné au musée. Les nuits intensifiées par les légendes contemporaines et les protagonistes de l’ombre. Les bals rythmaient mon quotidien après les tâches administratives. Le musée dissimulait des atouts et c’était mon rôle de les mettre dans la lumière. Des expositions ou des représentations coordonnées par mes soins quand le soleil ne demeurait pas réveillé. S’occuper pour éviter Ezio qui se situait dans les parages. Cette existence ne possédait plus de visage. Le miroir ne désirait pas montrer mes traits fatigués par la lassitude. Il y avait des jours ainsi. L’optimisme m’habitait dans les pires situations et pourtant, aujourd’hui il n’y avait pas d’engouement. L’épuisement des derniers préparatifs à propos du nouvel artiste et ses oeuvres, voilà surement la raison. Se ressourcer en lisant quelques pages d’un livre emprunté avant de tomber dans les bras de Morphée. Ou d’une autre personne.

Absolument rien de néfaste pouvait arriver à cet instant. Les bras d’Oskar m’offrait cette protection impossible à défaire. Il était là. Sa présence m’était indispensable. Nous avions quitté la France pour le nord depuis plusieurs mois. S’éloigner du monde et apprendre à mon tendre ses limites. Personne aurait l’idée de s’aventurer aussi loin dans cette forêt. Notre seul ennemi demeurait l’astre solaire. Battu à cet instant grâce aux rideaux tirés dans la pièce. Demandez moi de dormir pendant des journées entières et je le ferais. Les cycles du sommeil me semblaient si passionnants. Tout pouvait se passer grâce à l’imagination. Rassasier nos plus profonds désirs, comme affronter nos plus grandes craintes. Pour ma part, les cauchemars ne me hantaient plus depuis la disparition de mon créateur. La liberté était un cadeau. J’en savourais chaque nuit grâce à Oskar avec qui je me sentais moi-même. Aucune mort sur la conscience. Une vie harmonisée par l’amour et l’apaisement. Certes, quelques disputes comme il y avait dans toutes les relations mais, cela ne durait qu’un court instant. Elles n’existaient pas en comparaison à toutes les charmantes attentions. Le réveil avait sonné grâce au cher et tendre. Je n’allais pas m’en plaindre, bien au contraire. Les yeux souhaitaient surtout rester fermés. Le bras gauche posé sur sa poitrine s’appuya un peu plus. Une sorte d’étirement instinctif. « Mon ange.. » même pas la force d’énoncer le surnom en entier. Il ne fallait pas m’en demander beaucoup au réveil. Une heure ou deux de plus, cela ne serait pas refus. Je trouvais quand même le courage de lever la tête en sa direction en gardant ma mine matinale. Celle d’une enfant s’il était possible de l'évaluer. Les yeux ne s’ouvraient pas pour montrer mon désaccord face à ce réveil. Il m’offrit un baiser et la réponse fut un léger gémissement. « Ne devrions-nous pas rester encore dans le lit ? » Toujours le même discours. Oskar se réveillait le premier. Pourtant, on ne se lassait pas de ce quotidien. Je pris enfin le courage de les ouvrir. Je fondais à nouveau sur ses yeux bleus. Il possédait ce regard qui me faisait sourire à n’importe quel moment. Je le contemplais pendant plusieurs secondes. Une demoiselle éperdument amoureuse. J’étais tellement fière de lui. Ezio ne m’avait pas appris cette méthode. Se nourrir des animaux en ayant un respect profond pour les humains. Le contrôle de soi-même avait été laborieux mais, on pouvait tout faire avec de la volonté. Je m’étalai entièrement sur Oskar en posant ma tête sur sa poitrine. « Grève. » Autant commencer la soirée sous une pointe d’humour. Je tentais de mettre tout mon poids pour l’empêcher de bouger mais, malgré le fait d’être la plus vieille, sa force était bien plus supérieure.



Je peux te toucher, te sentir, t'aimer uniquement grâce à cette méthode. Tu penses que je t’ai oublié. Aujourd’hui, je suis déçue en t’observant vagabonder dans ce monde. Comme si je ne t’avais rien appris. Ce n’est plus toi. Je sais que tu as existé, voilà ce qui m’accroche. Autant garder ces moments dans mon esprit. T’en donner une comme tu en as rarement reçu de ma part. J’aimerais te remettre les idées en place. Je voudrais tellement être là pour toi.

Ses rêves le hantent il voudrait tant les éviter, ne plus jamais revoir son visage, ne plus jamais souffrir de son absence. Ne jamais la décevoir, car oui il sait combien elle est déçue de lui. Comment, alors qu'elle ne lui a jamais rien dit, il le sait, elle lui a appris à être un homme, un vampire parmi les hommes. Et il est devenu ce monstre, ce fléau parmi ses êtres inférieurs. Alors oui il sait qu'elle est déçue, qu'elle lui en décollerait une si elle était là, peut-être même bien pire. Mais elle avait déjà fait la pire des choses, le laisser, elle l'avait créé, cette bombe à retardement qu'il était chaque jour. En le laissant elle avait appuyé sur le chrono un chrono qui tournait depuis déjà bien trop longtemps. Étalant son malheur et sa souffrance sur les autres, sans les épargner la douleur qui lui arrachait ce coeur qui ne battait plus depuis déjà bien longtemps.

Son gémissement face à se réveille, chaque "matin" il y avait le droit, chaque "matin" il adorait l'entendre, chaque "matin" il aimait la voir non réveiller. Oui c'était un petit rituel, une espèce de jeu, même si quelque part il ne le faisait pas exprès. Lui n'avait jamais eut besoin de beaucoup de sommeil, elle au contraire. Elle était si belle, ses yeux bruns dans les siens, il ne pouvait plus s'en défaire. Comme hypnotiser par sa beauté. Lorelei, c'était le nom de cette rose encore en éclosion qui avait capturé son coeur. Il se laissait faire, comme toujours. Elle n'avait pas vraiment plus de force que lui malgré son âge avancé, vampirique. Mais elle le dominait, elle avait toujours dominé leur couple. Il était à ses ordres, il exauçait le moindre de ses désirs, non pas par faiblesse, non. Jamais. Mais par amour un amour infini et intemporel. Sa main dans ses cheveux, les caressants dans leurs longueurs, alors que son visage c'était posée contre son torse. Un sourire à ses lèvres, il ne bougeait pas, autre que cette main. Le regard sur les plafonds de bois, sur ses immenses poutres. Il était bien. Si bien. C'était une routine quotidienne, mais jamais il ne s'en lassait et jamais il ne s'en lasserait. La nuit ne faisait que commencer et elle était belle si belle à ses côtés.

Oskar ouvrir les yeux, ses draps étaient vide, si vide, pourtant il aurait cru pouvoir la toucher. Oui il avait espéré un instant qu'elle était réellement là sur lui. Comme avant. Se tournant il attrapa un des oreillers à ses côtés et le serra fort si fort contre son coeur, comme si ce bout de tissus remplient de plumes pouvait soigner les blessures que ses rêves lui offraient.

Sa peau froide sous ses doigts tout aussi glacés et pourtant une chaleur électrisante entre eux. Il ne pouvait cesser à jamais de la toucher, comme une drogue douce et apaisante. Il était encore jeune, un jeune vampire en tout cas. Mais elle avait su de par son amour le contrôler. Le calmer, le guider dans ce monde de ténèbres et de violence. Non avec elle tout était si différents, différent de ce qu'il avait pu imaginer des comptes et mythes. Avec elle le monde semblait beau et clair dans l'obscurité de la nuit dans laquelle ils vivaient pourtant. « J'ai faim. » Se conta-t-il de dire, comme un supplice entre ses fines lèvres. Il demandait toujours comme une permission, comme un enfant à sa mère. Il ne se contrôlait pas encore totalement alors elle l'aidait encore. Il bougea légèrement comme pour montrer son impatience de jeunes vampires. Ses crocs commençant à montrer les bouts de leur nez sans qu'il ne le veuille. Laissant la jeunefemme couler sur le côté, il se baissa sous les draps pour être à sa hauteur. Ses pupilles dilatées. Il n'aimait pas être ainsi, si incontrôlable encore. Il l'embrassa comme pour faire passer le temps avant de se remettre sur le dos, sagement.

Dans mes rêves, je te vois, je te sens. Malgré la distance et l’espace entre nous, tu restes dans mon esprit. Mon coeur continue à battre seulement en cette présence transitoire. C’est parce que je t’aime que je me dois de te fuir. Je veux te savoir heureux malgré mon absence.

Le temps figé dans ses bras. Je m’agrippais à lui en ayant peur qu’il quitte ses lieux. Depuis la disparition de mon créateur, il n’y avait plus de barrière. Ezio m’avait toujours dit que je le saurais s’il n’était plus de ce monde. La sensation qu’on me planterait un pieu en plein coeur. Pourtant, il n’y avait eu qu’un soulagement. Etais-je indigne en passant mes nuits avec un autre sans ressentir une once de tristesse ? Je ne voulais pas que ce bonheur cesse. Oskar représentait la perfection. Nous étions nous-même malgré les déboires. Vampires signifiait l’obscurité, une existence sous une lune déchue de joie. Condamné à vivre dans l’ombre, sans aucune compassion. Une âme perdue où l’objectif serait la destruction. Cette légende l’était si on le choisissait. Nous pouvions garder cette bonté grâce à la volonté. La faim ne devait être un obstacle mais, une banalité. Oskar apprenait encore à se contrôler. Pour l’instant, il n’avait pas gouté le sang humain. Pire des épreuves. Revenir à la raison après avoir bu ce liquide attrayant. Mon cher et tendre était trop jeune pour ceci. Je répondais à ses baisers avec autant de désir que le premier échangé à Paris. « Patience, mon ange. » murmurai-je avant de m'asseoir sur son ventre et attraper ses mains. « On n’obtient pas toujours ce que l’on désire dans la minute. Tu dois te contrôler. Fermes les yeux et oublie le monde. » Les doigts caressaient délicatement ses mains pour essayer de le détendre. Si j’avais eu cette chance de recevoir cette éducation.. Mon premier meurtre avait été fait dans les heures suivant la transformation. La pire des méthodes. Oskar ne faisait pas parti de ceux qui appréciaient tuer pour l’amusement, je le savais au plus profond de mon être. « Ton pire ennemi, c’est toi-même. Il se peut que demain je ne sois plus là pour te dicter ses règles. Il faudra alors que tu y penses même si les événements jouent contre toi. » Triste vérité à cause des chausseurs qui rodaient à la recherche de notre race. Ma naïveté pouvait facilement me jouer des tours. « Tu es plus fort que cela. » Il pouvait compter sur moi concernant son apprentissage. Je n’allais pas le lâcher de sitôt, il me manquerait bien trop. Sa douce voix ayant cet accent qui me faisait craquer dès qu’il ouvrait la bouche. Ses yeux si envoutants grâce à ce regard unique. Son rire qui remplissait mon coeur de joie à chaque fois que je l’entendais. Cette manière d’être.. ces attentions rares venant d’un homme. J’étais tout bonnement amoureuse.

Ce rêve était en fait un cauchemar ombré par un bonheur enfoui au plus profond de mon coeur. Les larmes désiraient se montrer mais, elles ne devaient pas être remarquées. Ezio pouvait se situer dans la pièce voisine. Pire, déjà couché sur la place libre du lit. Cela serait un jeu d’enfant pour lui de se faufiler dans ce rêve en voyant bien mes tracas. Il ne fallait pas se réveiller. En fait, je sentais sa présence, il était là. Prisonnière de mes sentiments, à jamais.